Nous allons tenter de désacraliser un sujet d’inquiétude ou de frustration pour la majorité de ceux qui défument ou tentent de (re)défumer.
Alors que Nelson Mandela disait : « Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends ! ».
Pour G.Allan Marlatt : « La rechute est la règle et non pas l ‘exception ! ».
Robert Molimard qui détestait ce terme de rechute, l’exprimait avec le « vol du canard », qui doit faire plusieurs tentatives en reprenant appui sur l’eau pour prendre de la vitesse et réussir son envol. Parce qu’il avait compris qu’à chaque tentative infructueuse, à chaque peau de banane, on apprend. Qu’il faut se donner du temps, être indulgent avec soi et que cet apprentissage est nécessaire pour arpenter le chemin qui vous mènera enfin à la liberté d’une vie sans tabac.
“On n’arrête pas par efforts de volonté. L’arrêt est automatique, involontaire. On mûrit lentement, et ÇA s’arrête, comme le fruit tombe quand il est mûr. Contrairement à un schéma répandu, qui assimile le fumeur à un malheureux Sisyphe, il ne s’agit pas d’un cycle, avec des arrêts et des rechutes, jusqu’à ce que par un miracle le fumeur s’arrête définitivement. J’aimerais voir rayer du vocabulaire le mot désespérant de rechute du tabagisme. Après chaque tentative, le fumeur ne revient jamais à l’état antérieur. La même eau ne repasse jamais sous le même pont. Il n’y a pas de rechutes, seulement des tentatives désespérées de contrôle. Appelons les des étapes parfois nécessaires avant l’arrêt définitif. Plutôt que l’image désespérante de ce cycle, je préfère voir l’arrêt du tabac comme le résultat d’une démarche finalement libératrice, l’envol d’un canard comme peut l’évoquer l’image ci-après “
Robert Molimard
Compréhension de la rechute
Pour ce faire, on se référera à tous les « Le sachiez-vous ? » précédents, en particulier :
- les dépendances,
- les 3 cerveaux,
- les tests d’auto-évaluation,
- la balance décisionnelle,
- les modèles cognitifs d’apprentissage,
- et enfin les TCC vues hier…
En analysant le cycle de « Prochaska et Di clemente » dans notre premier « Le sachiez-vous ? » vous savez maintenant que cette fameuse rechute peut se produire à n’importe quel stade. Mais que vous ne repartez pas à zéro, parce que vous avez appris de votre tentative.
Nous allons le reprendre plus en détail :
Pré-contemplation :
j’aimerais arrêter de fumer
Contemplation :
je me renseigne sur les méthodes, j’observe et je m’informe pour comprendre comment je souhaite défumer…
Détermination :
je suis décidé(e) et je vais m’en donner les moyens. Je choisi une date de début de défume, je choisi ma/mes méthode(s). J’en parle à un professionnel de santé pour m’accompagner. Je choisi d’en parler ou non à mon entourage pour m’encourager et m’éviter les risques. Je choisi de m’entourer d’un soutien complémentaire d’auto-support avec des pairs-aidants, des défumeurs confirmés…
Action :
je débute ma défume, je modifie quelques habitudes alimentaires. Je n’hésite pas à écouter mon corps qui est peut-être perturbé en faisant une cure de vitamines. Je m’hydrate, j’évite un temps, les boissons à la caféine ou théine qui me ramènent à ma cigarette. Je tente de m’octroyer quelques activités distrayantes, (si je peux, je privilégie la marche et les escaliers pour bouger…).
J’évite de grignoter des sucreries, j’évite de me mettre à l’épreuve, à proximité de fumeurs ou je rappelle à mon entourage social et de proximité, d’éviter de me tenter. Je rappelle à mes proches que j’ai besoin de calme même si je suis un peu nerveux/nerveuse. Je n’hésite pas à réajuster mes méthodes de défume si je souffre moralement ou physiquement, je m’entoure de soutien complémentaire par auto-support, je tiens un journal de défume…
Maintenance :
je reste toujours prudent(e) faces aux tentations environnementales. Je ne me défie pas, je prends soin de moi et je reste à l’écoute de mon corps en n’hésitant pas à demander à mon médecin de réévaluer mes besoins. Je prends conscience des bienfaits de ma défume, je continue de faire des activités et à m’octroyer mon temps « focus » pour mettre toutes les chances de mon côté.
Je me fais plaisir avec mes éconoclopes pour me récompenser, je dis fièrement que je défume ou que j’ai arrêté de fumer. Je me protège au maximum des gens négatifs qui ne comprennent pas ma démarche. Je continue de tenir mon journal de défume car j’ai besoin de libérer « la parole ».
Je n’hésite pas à demander soutien et/ou conseil sur mon groupe d’auto-support. Je remobilise mon corps par des activités ou des séances de kiné, je continue de m’hydrater et je réapprends à apprivoiser le « moi » sans tabac.
Rechute :
je n’ai pas assez respecté les étapes car j’étais empressé(e), parce qu’on ne m’a pas laissé le temps, parce que j’ai eu des problèmes qui m’ont déconcentré de moi. Parce que l’on a mal évalué mes besoins, parce que je ne voulais pas réajuster mes méthodes ou ne voulais pas ajouter d’outil de défume.
Parce que j’étais épuisé(e) car je ne me suis pas complémenté(e) en vitamines, parce que je ne me suis pas hydraté(e). Parce que je croyais que les substituts me rendaient malade, parce que j’ai grossi, parce que je n’arrive pas à me réapprendre sans cigarette, parce que je n’en ai marre …)
On peut être amené à comprendre que lorsque l’on vit une rechute en défume, il y a certainement quelques phases qui n’ont pas dû être consolidées.
La recherche a démontré que trois situations à haut risque sont associées à près de 75% des rechutes (Marlatt 1985):
- États émotionnels négatifs,
- Conflits interpersonnels
- Pressions sociales.
Marlatt dans son modèle de prévention de la rechute (RPT) de 1985 perfectionné en 1999 puis en 2004 donne des pistes utilisées en TCC :
- Comprendre la rechute comme un processus,
- Identifier et faire face effectivement avec les situations à haut risque,
- Faire face aux envies avec d’autres envies positives,
- (Re) mettre en place des procédures de contrôle des dommages pendant un certain laps de temps pour minimiser les conséquences négatives,
- Rester engagé dans sa démarche même après une rechute
- Apprendre comment créer un mode de vie plus équilibré.
Rappel
Le fumeur qui rechute reprend au stade de la contemplation et ne sera plus jamais un fumeur heureux, mais vous « sachez » maintenant que tous les succès sont basés sur des essais ratés.