Nous nous sommes penchés sur la rechute, qui n’est en aucun cas un échec, mais au contraire de l’expérience emmagasinée pour mieux rebondir, un apprentissage. Aujourd’hui nous allons nous tourner vers le craving, cette envie irrépressible de fumer qui nous nuit.
L’accumulation des études scientifiques sur le craving a abouti à son introduction comme critère diagnostique de l’addiction dans la dernière version du DSM 5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, traduction française 2015).
Le craving peut se résumer ainsi
- « Désir impérieux (parfois compulsif) de consommer une Substance Psycho Active (PSA) conditionné par l’envie d’en profiter sans délai ».
- Une composante essentielle des addictions
- Le critère 4 de la définition de l’addiction à une substance (DSM-5) : « Il existe un craving = envie intense de consommer la substance »
Charles Nicolas Aimé a écrit : « Le craving n’est pas le manque ». (Le Courrier des addictions 1999), plus précisément on pourrait compléter la définition du craving par : « n’est pas QUE le manque » car « l’envie d’en profiter sans délai » est trop souvent oubliée.
Il n’existe pas de consensus à l’heure actuelle, quant à un modèle explicatif unique du concept du craving. Cela tient à la difficulté de l’évaluer précisément et traduit probablement l’existence de plusieurs formes de craving. Selon les modèles théoriques choisis, le concept du craving peut intégrer des composantes déjà abordées lors des précédents « Le sachiez-vous ? » :
- cognitives,
- affectives,
- motivationnelles
- physiologiques.
Les modèles du conditionnement classique considèrent le craving comme une réponse automatique et inconsciente face à certains stimuli (Wickler)
Les modèles cognitifs représentent le craving comme un processus plus complexe du traitement de l’information [Marlatt … 1, 2, Tiffany…, 2].
Les modèles psychobiologiques proposent, un concept plus directement influencé par des processus neurobiologiques [Robinson…, Verheul…].
Les modèles motivationnels intègrent le craving dans un modèle d’ambivalence approche/évitement (Breiner…)
Les neurosciences s’intéressent aussi au craving avec un excellent article de Frontiers In Psychiatry, où l’ensemble des aspects de la recherche en neuroscience dans le domaine des addictions sont passés en revue. (Lien)
Ce qui ressort de l’ensemble des données actuelles
Le craving peut être induit par :
- des stimuli associés à l’usage de la substance
- par le stress,
- les affects négatifs,
- par la consommation de la substance de dépendance.
Le craving peut se manifester de différentes manières :
- Dysphorie (contraire d’euphorie)
- Insomnie
- Irritabilité, frustration, colère
- Anxiété
- Difficulté de concentration
- Agitation
- Diminution de la fréquence cardiaque
- Gain de poids
- Impatience
- Craving
Le craving est le symptôme le plus spécifique du sevrage tabagique.
Il se manifeste dès la phase initiale de l’arrêt, mais il peut apparaitre longtemps après l’arrêt, même en l’absence de manque, et favorise la reprise de la consommation de tabac.
Il est la cause la plus fréquente des échecs des tentatives d’arrêt du tabac.
Plus il est intense et fréquent, moins la probabilité de réussir l’arrêt à long terme est élevée.
L’ensemble des symptômes évoqués doit attirer la vigilance du défumeur :
- libérer la parole en cherchant du soutien sur le groupe auto-support
- l’inciter à réévaluer ses dépendances au tabac
- revoir sa balance décisionnelle
- relire son journal de défume
- valider à nouveau l’ensemble de ses motivations
- au besoin réajuster sa substitution
- et/ou la (les) méthode(s) utilisée
- et/ou la compléter au besoin par des méthodes complémentaires